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jeudi 16 février 2012

Garry Conille choisit son camp

Le Premier ministre demande à ses ministres de répondre à la convocation de la commission sénatoriale sur la nationalité des membres du gouvernement, dans un communiqué publié mercredi. Une position contraire à celle adoptée en conseil des ministres présidé par le chef de l'Etat. Le ministre chargé des relations avec le Parlement considère le communiqué de la primature comme un tract.

 Une crise bien alimentée. Un bras de fer entre les plus hautes autorités du pays. Une guerre de communiqué contradictoire entre la primature et la présidence. Le Premier ministre Garry Conille, au grand dam du président Michel Martelly, a demandé aux membres du cabinet ministériel de répondre à la convocation de la commission sénatoriale chargée d'enquêter sur la nationalité des membres du gouvernement. « Dans le respect des prérogatives constitutionnelles de chaque pouvoir de l'État et en raison du caractère impératif de l'acte de convocation, le Premier ministre demande à chaque membre de son gouvernement de répondre à ladite convocation au lieu et à l'heure indiqués dans la correspondance du Sénat », a ordonné le chef de la primature dans un communiqué.

Ce communiqué est un tract, a estimé, mercredi, le ministre chargé des relations avec le Parlement, Ralph Théano. Il a dit être au courant de cette décision de son chef par la voix des ondes. Selon lui, la résolution prise en conseil des ministres, lundi, de ne pas répondre à l'invitation de la commission sénatoriale sur la nationalité des membres du gouvernement vient directement de Garry Conille lui-même.

« La présidence ne nous a rien imposé. Lors du conseil des ministres, le président et le ministre des Affaires étrangères ont dû se déplacer pour aller rencontrer la délégation de la CARICOM qui venait d'arriver au pays. Tout au long du processus, ni le chef de l'Etat ni le chancelier n'étaient dans la salle », a révélé le ministre, qui est en nette contradiction avec son supérieur, le Premier ministre.

Ralph Théano a indiqué que probablement il va y avoir un autre conseil des ministres sur ce même dossier qui met dos à dos le président Martelly et son chef de gouvernement. Le ministre a demandé une sorte de délai à la commission sénatoriale.
Selon le locataire de la Primature, dans son communiqué, « au moment où toutes les conditions psychologiques et financières semblent réunies pour le décollage du pays, les dirigeants et les acteurs politiques ont pour devoir de travailler à consolider la stabilité institutionnelle et gouvernementale, et à éviter qu'une nouvelle crise vienne compromettre l'harmonie des pouvoirs et la synergie des efforts pour la reconstruction nationale. »

24 heures avant le communiqué de Garry Conille, la présidence avait informé de la décision qui avait été prise par « le gouvernement, réuni en conseil des ministres, à la date du 13 février 2012, de ne pas faire droit à la demande du Sénat de fournir les pièces relatives à la nationalité de ses membres. »

Elle avait invité donc « toute personne détenant des preuves que certains de ses membres seraient étrangers, au regard de la loi haïtienne, à les faire valoir devant les juridictions compétentes. »

En outre, la présidence avait dit demeurer respectueuse des institutions de la République, néanmoins, dans les limites que leur assigne la Constitution, particulièrement l'article 60-1 de la Constitution d'après lequel « aucun pouvoir ne peut, sous aucun motif, ... sortir des limites qui lui sont fixées par la Constitution et par la loi ». Cet article interdit en effet à un pouvoir d'empiéter sur les compétences d'un autre pouvoir.

Selon un ultimatum de la commission d'enquête sénatoriale, les membres du cabinet ministériel doivent soumettre les documents exigés par la commission dans un délai de 48 heures expirant le jeudi 16 février 2012. « La commission encourage le Premier ministre, les ministres et secrétaires d'Etat à déposer leurs passeports et documents de voyage dans les 48 heures qui suivent pour que nous ne nous trouvions pas dans la pénible obligation de les interpeller », avait martelé le président de la commission, le sénateur Joseph Lambert, considéré comme un allié du président Martelly.

Plus d'un se demande combien de ministres vont respecter la demande du chef du gouvernement. Selon ce qui se dit dans les couloirs du Parlement, Garry Conille est un général sans troupes, un Premier ministre sans ministres sous ses ordres. Tout se décide au niveau du palais national, dit-on.

Robenson Geffrard et Jean Pharès Jérôme

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